Bienvenue sur le jardin de Pestoune

Bienvenue sur le jardin de Pestoune


Bonjour et bienvenue sur le jardin de Pestoune. Vivant dans la campagne Franc-Comtoise, j'ai la chance de posséder un jardin. Dans ce blog, je voudrais partager avec vous mes expériences en matière de jardinage. Et j'espère pouvoir échanger avec vous, amis lecteurs, des conseils.

samedi 21 mars 2015

Le catalogue national des semences.



On vit la fin d'un monde où on pouvait garder ses semences et les replanter l'année d'après sans pesticides ni autres engrais chimiques, comme le faisaient les hommes depuis qu'ils ont découvert qu'en plantant, ça poussait  ! !

Cet été un maraîcher de Lavelanet, commune ariégeoise, a été contrôlé et verbalisé sur le marché ...
Son délit ?  Avoir vendu des tomates "hors catalogue"  !...

Cette histoire fait l'objet d'une chronique d'Olivier de Robert, un conteur ariégeois qui commente l'actualité et qui nous raconte cette injustice avec humour.



Qu’est-ce que le catalogue de semences ?
Le catalogue des semences a été créé en 1922 pour établir un registre des espèces et variétés nouvelles de plantes dont le suivi était assuré par un comité de contrôle. Une nouvelle variété inscrite était donc protégée pour une durée de 12 ans avant de tomber dans le domaine public.
Peu à peu, par décrets successifs au cours des années, la législation à propos des semences évolue pour protéger les nouveautés.
Les choses commencent à changer avec, en 1961, la création par les semenciers professionnels de l'UPOV (Union pour la Protection des Obtentions Variétales). Ceci cherchent à contrôler le marché de semences et arrivent à leur fin par le Décret 81-605 du 18 mai 1981, (J.O. Du 20 mai 1981) qui stipule que: « Le ministre de l’agriculture tient un catalogue comportant la liste limitative des variétés ou types variétaux dont les semences et plants peuvent être “mis sur le marché” sur le territoire national. L’inscription sur le catalogue est subordonnée à la triple condition que la variété soit distincte, stable et suffisamment homogène.»
Donc en Europe, pour pouvoir être commercialisées, les semences de la plupart des espèces cultivées doivent être contrôlées, certifiées et inscrites au catalogue des semences.

Qu’est-ce qu’une nouvelle variété de plantes ?
Disons les choses simplement : il s’agit de plantes génétiquement modifiées, des hybrides censés être plus résistants, offrir un meilleur rendement… Bien souvent ces hybrides sont clonés les uns avec les autres et inscrits comme étant une nouvelle semence, ce qui donne l’illusion d’un grand nombre de variétés. Quid des variétés traditionnelles en faveur de nouvelles variétés sous la coupe des grandes industries céréalières affiliées à des groupes tels que Monsanto qui ont la main mise sur ces semences. Il faut avoir conscience que 99 % des variétés cultivées par les agriculteurs sont des variétés protégées.

Qu’est-ce que cela implique pour la biodiversité ?
Ressemer sa récolte entraîne des adaptations dans l'espèce végétale, et favorise la biodiversité. En effet les plantes s’adaptent naturellement au sol, au climat, aux conditions locales et de nouveaux caractères apparaissent spontanément pour résister aux diverses agressions auxquelles elles sont sujettes. La nature est bien faite et s’adapte toujours pour le mieux-être et la sauvegarde de la plante. Cela permet également de réduire les pesticides et les engrais.  A l'inverse, les semenciers adaptent les plantes aux mêmes engrais et pesticides. Ils tendraient donc plutôt à créer de l'uniformité dans les plantes, où qu'elles soient cultivées. 
Aujourd’hui la biodiversité est menacée parce qu’on nous impose un nombre limité de semences. En effet, un document de la FAO  (Food And Agriculture Organization) fait le constat alarmant de cette perte de biodiversité dans le monde : Plus de 90% des variétés agricoles ont disparu des champs et 75% de la nourriture provient de seulement une vingtaine d’espèce alors qu'il existe des milliers d'espèces alimentaires sur la planète.
La biodiversité alimentaire a été conservée de façon vivante dans les champs des paysans pendant des milliers d'années. Il est aberrant aujourd’hui d’entendre dire qu’alors qu'on a confisqué et congelé des centaines de variétés anciennes, que sans la technique moderne, on ne pourrait pas les sauvegarder.

Peut-on cultiver, donner ou vendre des variétés anciennes non inscrites au catalogue ?
Vous pouvez les cultiver à titre personnel mais il vous est interdit de les échanger même à titre non onéreux, encore moins de les vendre. De même il vous est interdit de vendre ou de donner les semences radiées du catalogue.

Kokopelli
En 1999, est né Kokopelli, une association à but non lucratif. Le nom de Kokopelli fait référence au petit joueur de flûte bossu, symbole de fertilité, de joie, de fête, de longue vie chez les amérindiens depuis plus de 3000 ans. 
Cette association lutte pour la Libération de la Semence et de l’Humus et la Protection de la Biodiversité alimentaire. Elle permet aussi à tous ceux qui sont intéressés par un jardinage respectueux de l’environnement de se donner discrètement les recettes des purins de plantes (ortie, prêle...) et d'autres ingrédients naturels et peu onéreux, sans se voir accuser de concurrence déloyale envers les multinationales comme Monsanto.

Elle conserve plus de 2700 variétés de semences reproductibles. Elles sont ressemées selon les méthodes de nos grands-parents. L’association s’engage  à distribuer gratuitement des semences reproductibles aux paysans du Tiers-monde (Afrique, Amérique du sud, Asie, Europe de l’Est, etc.) pour qu’ils retrouvent une autonomie alimentaire. Elle s'attache aussi à l'information des citoyens sur des sujets aussi divers que les abus générés par les brevets sur les semences ou les pressions des groupes de pression sur les recherches concernant les organismes génétiquement modifiés (OGM).
Or Kokopelli dérange les semenciers. L’association vient d’être reléguée par la Cour de Justice de l’Union Européenne au rang de pirate de semences. Kokopelli devient hors la loi. Ce qui confirme le fait qu’en Europe, il n’est plus possible de vendre des semences anciennes, rares, originales. Seuls les produits standardisés, formatés, homogènes sont autorisés.

La Cour de Justice de l’Union Européenne a confirmé le 12 juillet dernier l'interdiction de commercialiser les semences de variétés traditionnelles et diversifiées qui ne sont pas inscrites au catalogue officiel européen. Des associations comme Kokopelli ou Semailles se retrouvent dans l’illégalité: elles préservent et distribuent ces semences. Voici un article expliquant la situation en détail :

Conclusion :
Prétextant une sécurité et une efficacité accrue pour les agriculteurs, le lobby des semenciers a réussi à mettre en place une liste officielle des semences qui peuvent être vendues. Toute espèce non inscrite ne peut être commercialisée. Bien sûr, pour y figurer, il faut remplir des conditions très strictes, d’abord financières en payant un droit d’entrée et de maintien au catalogue, puis concernant la DHS (Distinction, Homogénéité et Stabilité). La variété doit être différente des autres existantes, avoir des plantes identiques et être suffisamment stable dans le temps.
Et que retrouve-t-on dans ce catalogue ? Oh surprise, Une large majorité de semences hybrides F1 provenant des grosses firmes. En 2004, 96% des tomates du catalogue étaient des hybrides et 1% seulement des anciennes variétés (Source : analyse de Kokopelli)
Le système est donc cadenassé et la biodiversité est fortement menacée.


L’ère est à l’uniformisation, aux gros fruits et légumes, calibrés mais peu goûteux, venant d’un pays parfois lointain. Or nous avons tous des producteurs locaux qui se servent encore du bon vieux fumier comme engrais et qui nous offrent des légumes certes petits et biscornus mais avec de vrais saveurs. Le plaisir de manger des légumes de nos grands-mères, des espèces variées et goûteuses nous est aujourd’hui interdit…
Pour les agriculteurs, le réensemencement de leurs propres semences sera interdit ou taxé d’ici peu. Nous perdons toute liberté petit à petit.

Sources :

Pour d'autres chroniques d’Olivier de Robert voici son site :

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